jeudi 26 janvier 2012

Pouvoir et Politique. Les mots du président

       Les déclarations du président de la République du 24 janvier sont révélatrices d’une conception toute particulière de la fonction présidentielle et de la politique en générale. Et j’ai bien peur qu’elle soit devenue la conception majoritaire dans l’opinion…

       Il faut rappeler que présider la France ce n’est pas un métier, c’est une fonction. C’est représenter une institution, l’incarner pendant une période de temps donnée. En l’incarnant on lui donne vie, on la fait avancer dans une direction qui correspond à nos idées. Des problèmes sont à résoudre pour améliorer toujours la vie de la collectivité. Gouverner c’est s’attacher à résoudre ces problèmes le mieux possible au regard du bien commun, suivant la définition qu’on en a et que les Français ont approuvé par leur vote. Pour les résoudre il n’y a jamais une seule solution. Pierre Mendès France disait « gouverner c’est choisir ». Être président de la République c’est avoir une vision de la France pour laquelle on est prêt à se battre. Voilà ce qu’est la politique, le combat des idées, une volonté d’action, des choix… Le reste ce n’est pas la politique, c’est le pouvoir. La politique c’est la volonté de faire, le pouvoir c’est la capacité de faire. Nicolas Sarkozy n’a pas gouverné parce que la France en avait besoin, il a gouverné parce qu’il en avait envie. Il voulait prouver qu’il était capable. Comme dirait Coluche, il voulait « le pouvoir pour pouvoir pouvoir ». Et il l’a eu tout entier, de la mairie de Neuilly à la présidence de la République, en passant par la présidence du Conseil Général des Hauts-de-Seine, un siège de député et quatre ministères différents. Ce n’est pas le sens de l’Etat qui l’a guidé, ce ne sont pas pour des idées qu’il s’est battu mais c’est pour son prestige qu’il a « conquis ». Maintenant le prestige consommé, Nicolas Sarkozy n’a que faire de la présidence : "En cas d'échec, j'arrête la politique. Oui, c'est une certitude."

     Un exemple frappant de sa conception de la politique est sa vision de ce qu’est un  parti, qu’il a dévoilé malgré lui dans ses déclarations. L’UMP a été pour lui le simple instrument de son accès au pouvoir. Pour Monsieur Sarkozy un parti n’est qu’une simple machine électorale par laquelle on peut obtenir un réseau assez influent et lever des fonds suffisants pour gagner une campagne. Et pourtant qu’est-ce qu’un parti au départ si ce n’est un groupe pour la défense d’une idée ? Il en va ainsi des premiers partis sous la Monarchie de Juillet. Le parti du Mouvement affrontait le parti de la Résistance, l’un militant pour l’extension du suffrage et l’autre voulant préserver la concentration du pouvoir. Un parti doit avant tout être un lieu de rencontre pour les citoyens qui partagent des valeurs et qui veulent les défendre ensemble. Ce doit être un lieu de débat sur la définition du bien commun et sur la direction à prendre. Ce doit être une structure où l’on pèse la qualité des arguments pour juger des moyens de l’action. Mais le débat d’idée n’est pas la tasse de thé de Monsieur Sarkozy. Convaincre les autres de la valeur de certaines idées, générer des convictions, ou débattre des meilleures solutions à apporter à un problème, cela ne l’intéresse pas. Il trouve même ça dégradant. "Vous voulez que j'anime des sections UMP ? Je ne mérite pas ça. Je préfère encore le Carmel, au Carmel au moins, il y a de l'espérance !". De l’espérance… Ainsi il n’y a d’espoir que quand il y a l’espoir d’obtenir plus de pouvoir ? Il a bien fait d’ajouter "Je ne suis pas un dictateur" car de telles paroles font douter…

        A une époque de désillusion, aux taux d’abstention record, avec une montée des extrêmes, il est temps de renouveler la vision de la politique. Il faut retourner aux véritables définitions des mots «parti », « institution » ou encore « gouverner ». Il faut redonner foi aux citoyens dans leur capacité d’action et dans la nécessité de participer tous au grand projet République. Pour cela nos dirigeants devront savoir garder leur place et surveiller leurs mots…

1 commentaire:

  1. Il est effectivement grand temps de redonner de la dignité à la fonction de président de la République. Il est temps aussi que nous remettions au goût du jour l'éthique de la politique, que les mots retrouvent leur sens et leur importance, que le respect de l'autre revienne sur le devant de la scène...

    RépondreSupprimer